C’est grâce à notre bible du voyageur, « le guide du routard », que nous trouvons l’adresse d’Arianne. Désireux de faire un trek à cheval dans la steppe de Patagonie et de rencontrer les fameux « gauchos », nous contactons cette dernière afin d’échanger sur les possibilités existantes pouvant répondre à nos attentes.
Très à l’écoute et arrangeante, nous décidons de nous rendre chez elle en ce samedi 23 Février.
Arianne est une femme d’une cinquante d’années, d’origine hollandaise mais née en Argentine, (raison pour laquelle elle possède la double nationalité) et parle plusieurs langues, dont le français ! Amoureuse de l’Argentine et des chevaux, elle vit depuis 5 ans dans une magnifique maison en bois, accompagnée de ses 6 chiens, de sa charmante soeur Caroline, qui passe la moitié de l’année ici et l’autre à Paris, et de notre ami Sacha, arrivé par Workaway il y a plus d’un an et qui n’est jamais reparti.
Sur les coups de 16 heures, notre taxi Silvio nous dépose dans ce petit paradis sur terre.
Nous sommes accueillis par Arianne, Caroline et Sacha, découvrons cette incroyable maison en bois, son jardin avec vue sur le lac et notre chambre, incontestablement la plus belle de notre Tour du Monde.
Sacha nous amène faire un tour dans le champ situé à 200 mètres de la maison, afin de faire connaissance avec les chevaux. Nous sommes déjà charmés que la soirée n’a pas commencée.
Nous rencontrons Jean Paul et Patrick Morvan (le célèbre skipper breton !), ces deux amis bretons en voyage depuis 2 mois et demi, ainsi que Jean Louis, vieil ami d’Arianne et ancien vigneron, venu en Argentine pour profiter de ce merveilleux pays et surtout pour y grimper deux trois colles de 6000 mètres. Rien que ça.
Nous passons une soirée extraordinaire. Tous réunis autour d’une belle et grande table en bois, nous nous régalons des bons plats de Dino, cuisinier venu exprès pour la soirée, et surtout des histoires incroyables de Patrick à bord de son voilier, des voyages de Jean Paul, des sommets de Jean Louis et de la vie de nos trois hôtes préférés.
La vie, c’est des soirées comme celle-ci, surtout quand le vin coule à flot.
Le lendemain, après une bonne nuit quoiqu’un peu trop courte, pas de place pour la gueule de bois : en scelle ! La pampa nous attend.
Nous disons au-revoir à Jean Paul et Patrick, repartant quelques heures plus tard pour la France, et montons sur le dos de Caminito pour Marion et de Sìmon (dit Saillemòn) pour moi. Accompagnés d’Arianne et de Jean Louis, l’aventure commence.
La pampa, ce vaste terrain désertique, représente 80% de la Patagonie (on a pu s’en apercevoir durant nos dizaines d’heures de bus). En traverser une partie à cheval est une expérience fabuleuse. Durant 3 heures, nous profitons de la steppe et observons les chiens nous accompagnant chasser des lièvres plus gros que mon golden. Nous faisons corps avec nos chevaux, et nous nous permettons même quelques galops dignes de ce nom.
Nous arrivons en début d’après-midi chez Adriàn et sa famille : nous allons rencontrer une famille de gaucho pour la 1ère fois de notre vie.
Les gauchos (de guacho, orphelin) sont arrivés dans la Pampa à la fin du XVIIIème siècle. Le gaucho est le symbole même de l’Homme libre qui se moque des préjugés sociaux et des conventions établies. Hispano-indien d’origine, son esprit d’indépendance et sa force de caractère en font un révolutionnaire né.
Aujourd’hui, le vrai gaucho, cette brute magnifique, a disparu depuis plusieurs décennies, la faute à l’arrivée du fil de fer barbelé, dise certains.
Mais il existe encore de vrais descendants de gauchos, qui se considère d’ailleurs comme tel, et à juste titre.
Adriàn en est l’exemple même. Jamais sans son « facon » ce féroce couteau d’autrefois, de son « boladora » (lasso argentin), de son « tirador » (large ceinture) et de son béret, ce gardien de la pampa possède notamment 7 chiens, des vaches, des taureaux et 16 chevaux (sans compter ceux qu’il dresse pour les revendre), et veille sur 15000 hectares de pampa. Quel homme.
Nous sommes reçus avec beaucoup de classe mais tout en simplicité : un énorme asado (barbecue) préparé par Adriàn et sa femme Alejandra, et que nous dégustons avec Maya, la petite et récemment victorieuse d’un concours de cheval, Bruno et Mateo, les deux neveux qui passent leur temps ici, avec les animaux, et Adrian Junior, leur fils mignon à craquer.
Après avoir mangé une viande à tomber par terre, nous dégustons pour la 1ère fois le Maté, boisson traditionnelle d'Argentine. Mais attention : pas le Maté que l’on trouve en sachet au supermarché ! Ici, place au vrai Maté, celui que l’on boit dans une « corones » de taureau et que l’on partage chacun son tour. Un délice.
Je propose en suite une petite partie de foot à ceux qui le souhaitent pour digérer, et surtout afin de continuer à créer un lien avec cette famille exceptionnelle. Je trouve preneurs ! Ça joue et ça rigole (le foot, ce langage universel). Résultat des courses, Marion et moi sommes invités à dormir chez eux le surlendemain. On en demandait pas tant !
Arianne et Jean Louis devant rentrer, c’est mon nouvel héros Adriàn qui nous accompagne sur le chemin du retour. Pratiquant le cheval depuis qu’il sait marcher, et ne se servant quasiment pas d’autres moyens de locomotion, cet homme libre dégage une sensation de force et de sérénité impressionnante sur son cheval. Juste classe.
Ce soir, depuis notre dortoir de 6 personnes dans le centre de Bariloche, nous allons faire de beaux rêves.
Le surlendemain, nous retournons chez Arianne, tôt dans la matinée. Nous voulons profiter de la maison, de son jardin. On s’y sent tellement bien.
Nous faisons la connaissance de Karim et Clémentine, deux parisiens en vacances en Argentine pour 3 semaines, et qui ont eu eux aussi la fabuleuse idée de faire appel à Arianne pour vivre un moment à cheval inoubliable.
Le midi, nous les rejoignons tous les 3 (Arianne et ces derniers, donc) chez Ida et Negro. Ida et Negro sont deux gauchos de l’ancienne génération (leur petite maison est d’ailleurs un musée vivant !) Nous partageons avec eux et leurs amis un bon plat de viande cuisiné par Ida, si charmante et attachante, ainsi que quelques bouteilles. Y’a pas à dire, les gauchos savent recevoir... les argentins en général, d’ailleurs.
Petite parenthèse : nous étions, de chez Arianne, venus chez Ida et Negro en taxi (15km), mais n’ayant pas assez de liquide pour en reprendre un au retour, nous sommes donc rentrés... en stop. Nous avons quand même dû marcher une heure en plein cagnard, le ventre lourd et dans un coin bien perdu avant qu’heureusement, un argentin charmant dénommé José s’arrête pour nous prendre ! Merci José !
Nous avons une heure pour nous reposer chez Arianne avant de repartir chez Adrian et sa famille !
Très heureux à l’idée de passer la soirée chez eux, nous souhaitons arriver le plus tôt possible pour en profiter et aider à cuisiner : ce soir, Caroline, Sacha et nos deux parisiens vacanciers se joignent à nous pour le repas, il y a donc un peu de travail !
Nous sommes reçus par Alejandra et Bruno, avec de grands sourires qui font chaud au cœur. Après quelques dizaines de minutes à bavarder, Bruno nous demande : « êtes-vous déjà montés sur une vache ? » « Euh, non, pas vraiment Bruno ». 5 minutes plus tard, nous voici sur le dos de Flaure, cette vache de 800 kg.
Nous aidons ensuite la maitresse de maison à préparer les 30 steaks assaisonnés à l’ail, au piment et au persil local : ce soir, c’est hamburgers maison ! (bon après, je pense qu’on va faire une pause sur la viande pour plusieurs jours).
Une fois terminé, nous entendons les 7 chiens aboyer : Adrian et Mateo rentrent de la pampa à cheval (durant les vacances scolaires, Bruno, Mateo et Maya aiment aider Adriàn : ici, la playstation n’a pas sa place).
Ils nous proposent alors de partir marcher tous ensemble aux alentours de la maison, afin d’attacher les chevaux et de faire encore un peu courir les chiens. Un moment de partage qui restera graver en nous pour longtemps. C’est assez incroyable comme parfois, « peu » peut nous apporter tellement plus que « beaucoup ». A méditer.
Nous rentrons sur les coups de 20h30, les « autres » invités sont là.
Après un foot-tennis rapide avec Karim, Bruno et Mateo, nous rentrons commencer l’apéro, puis attaquons la « cena » (le diner).
A l’image de samedi soir, la soirée chez cette belle famille gaucho fût exquise. Nous avons mangé et bu comme pas possible, nous avons rigolé à en avoir mal au ventre, nous avons pu échanger sur les coutumes de chacun, et avons même eu le droit à un petit concert d’accordéon de Mateo, le « Mbappé » de la musique (oui, Mbappé a même ses fans à l’autre bout du monde...).
Nous passons, Marion et moi, la nuit dans la pièce à trophées, là où toutes les médailles, toutes les scelles et autres accessoires de défilés et de compétitions gauchos sont accrochés (tout ce que vous voyez sur la photo est fait main par la famille).
Le lendemain matin, pendant que Marion dort encore un peu, je sors marcher avec Bruno à 7h30 afin de respirer cet air si pur et de m’imprégner encore un peu de cet environnement pour commencer du mieux possible la journée.
Après avoir partagé un petit déjeuner au Maté avec eux, pris une douche chauffée au feu de bois, et trait une vache pour la 1ère fois, nous apprenons que nous sommes les 1er invités occidentaux (hors locaux, donc) à dormir dans leur maison. Quelle fierté.
L’heure des adieux est arrivée. On pleure de l’intérieur. Avoir pu partager leur quotidien, contempler leur sens de la famille, l’amour qu’ils portent, le bonheur qu’ils dégagent en vivant si simplement fait tellement réfléchir.
Accompagnés de Bruno et Mateo, nous rentrons à pied chez Arianne, qui nous raccompagnera une heure plus tard au terminal de bus, où 19 heures d’autocar nous attendent de pied ferme pour rejoindre Santiago du Chili. Heureusement, nous avons des souvenirs à foison pour passer le temps. Et moi j’ai mes articles à écrire.
N.B : Vivre des moments comme ça, aussi forts, aussi vrais, à l’autre bout du monde font partie de ces choses qui façonne un homme en profondeur, et c’est ce qu’on ressent sincèrement en nous, Marion et moi.
« Vous pensez faire un voyage, mais c’est en fait le voyage qui vous fait ».
Jean Paul et Patrick, à bientôt en Bretagne, autour d’une assiette d’huîtres chez Jackie ou sur un voilier ?
Jean Louis, on se retrouve dans le Sud-Ouest pour une partie de pêche !
Arianne et Caroline, merci encore pour votre accueil, votre chaleur et votre simplicité. Des gens comme vous, le monde devrait n’avoir que ça.
A bientôt, en Argentine, en France ou ailleurs.
Sacha, don’t take your time, you have more 300 cheeses to try in Bordeaux !
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